Patrouille, et repérages ( PV Sano Seiichiro )

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C’était une journée classique, Daigo patrouillait avec sa garde prétorienne, les quintuplés Okado qui égorgeaient tout le monde du regard. Ambiance sympathique, et c’étaient eux la sécurité, les renforts, la cavalerie … la vie pouvait être ironique, mais tant qu’on était du bon coté du bâton, ça allait. C’était la loi du plus fort, et Daigo faisait partie des plus forts. Portant tranquillement son long sabre contre son épaule, il repérait les éventuels fauteurs de troubles, ainsi que ses futures proies. C’est qu’il y avait de jolies filles dans le coin, de la bonne chair fraîche. Daigo ferait discrètement son tri parmi celles qu’il piégerait, et les moins douées, il les laisserait à son gang. Normal que les plus forts aient ce qu’il y avait de mieux, mais en même temps il ne fallait pas oublier l’esprit de corps, même un chef veillait à l’intérêt de ses sbires, surtout un chef qui voulait durer, c’était une sorte de fraternité. Même une brute comme lui pouvait se réveiller avec un poignard dans le cou. Un chef avisé, aussi fort qu'il fut savait qu'il n'était pas invincible et agissait en conséquence.

"Vous là, vous voulez que je vous apprenne le respect ?"

Daigo colla son sabre sous le menton d’un élève qui avait jeté un emballage vide au sol, alors qu’il y avait une poubelle à deux pas. Comprenant brutalement son erreur, l’élève ramassa fébrilement le déchet et le jetta dans la poubelle.

"Ca ira pour cette fois. Hors de ma vue."

L’élève s’excusa et détala sans demander son reste, et Daigo continua la patrouille. Il aimait bien ces petits moments de détente, de repérage. Il se dit aussi que l’essentiel de son gang était tout de même assez faible, et qu’il lui faudrait recruter des gars plus forts parmi les rebelles du lycée. C’était important pour l’émulation, et de rajouter du sang frais dans sa bande. D’ailleurs, il en avait vu deux-trois, mais il n’avait pas eu le temps de s’attarder sur leur cas. Des filles sexy, des recrues potentielles, ce lycée serait à priori un bon vivier. Les fortes têtes qui se dresseraient, il les combattrait, bien sur pas en public, ou alors un public restreint sur lequel il ferait pression pour qu'ils se taisent. Quant aux fortes têtes qui ne cherchaient pas les ennuis, ni des avantages à être dans son gang, il verrait au cas par cas. Dans tous les cas il y aurait de l'action, de la bagarre, du sang. Daigo avait toujours aimé se battre, depuis toujours, et si c'était le mode d'expression le plus simple, le plus basique, c'était le moyen de communication préféré du colosse.

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Y avait pas à dire, ce lycée renfermait des spécimens étranges. Jusqu'ici, je n'avais eu l'occasion que de les observer de loin, alors qu'ils dicutaient entre eux, dans leur cercle fermé. Ces types avec des gueules de tueurs, et des couilles de chanteurs d'opéra, y en avait des tonnes. En fait, j'avais eu l'occasion de me confronter à eux une bonne dizaine de fois. Ca, ils gueulaient, c'était sûr, mais quand on leur répondait avec le sourire, ils se regardaient entre eux disaient quelque chose comme "t'as de la chance", et filaient, la queue entre les jambes. Jamais un seul d'entre eux n'avait émis une menace contre moi. Ah, ça, c'était forcé, dans une ville riche, on ne trouvait pas les mêmes esprits que là d'où je venais. La hargne, la violence insolente, et la menace étaient remplacés par la comédie, et la pitié. Qu'ils jouent les durs, ils ne m'intéressaient pas.
C'était à peu de choses près mon état d'esprit, ce jour-là, alors que j'écumais une énième fois la cour du lycée, cherchant un gars plus osé que les précédents. Je détestais provoquer les ennuis. Je préférais qu'ils me tombent dessus, mais ici, il fallait presque demander des ennuis, pour en recevoir. J'étouffais un rire. J'en avais marre, de ces faibles. Je passais près d'un groupe de "caïds" d'environ un an de plus que moi. J'entendis des "eh, r'gardez c'mec", et d'autres phrases, dites juste assez haut pour que je puisse les entendre. Nonchalemment, j'arrêtais mon pas et tournais la tête vers eux. Quelques uns me regardaient, rigolèrent en croisant mes yeux, mais comme je soutenais leur regard, finirent par sentir leur rire mourir dans leurs gorges. Je soupirais, et passais mon chemin. Si le code de l'honneur n'avait jamais existé, je leur aurait fait taire ces rires, seuls moyens de dire "je suis l'plus fort, regarde, j'me fous d'ta gueule". Pitoyable.
Au loin, un homme à la carrure impressionnante attira mon attention. Le genre de mec qui se faisait gonfler de partout pour plaire aux filles. C'était la seule utilité qu'avait le muscle, dans le coin. Il ne paraissait pas assez jeune pour être étudiant, ici. Je le vis menacer un élève à l'aide d'un sabre. J'en ignorais la raison, mais tout ce que je compris, c'est que lui et cinq mecs complètement identiques menaçaient un pauvre mec qu'ils surplombaient de taille, mais aussi d'âge.
Je me mis en tête de les tester à leur tour. Nous verrions s'il savait utiliser son corps sans son sabre, ce géant à sale gueule. Avançant tout droit vers lui, je fis mine d'être plongé dans mes pensées, quand je le percutais de l'épaule droite dans le bras qui tenait le sabre dans l'espoir de le faire tomber. Sans vérifier si le sabre avait chuté de sa main, je me retournais violemment, et dis d'un ton aggressif :

"Eh, enfoiré, fais gaffe où tu marches, je pourrais avoir envie de t'apprendre à t'écarter..."

Aggressif, mais calme, quand même. Le genre de menace qui donnerait des sueurs froides au meilleur comédien du lycée, et qui le ferait dire "tu parle pas comme ça", avant de partir. Nous allions voir comment se défendrait le grandasse qui me faisait face et à qui j'envoyais un regard meurtrier. Ce faisant, je remarquais sa balafre à l'oeil droit. Nous avions une chose en commun, car la brûlure de mon oeil y avait apposé une large cicatrice, mais sur l'oeil gauche.

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Le sens du combat, ça ne s’apprenait pas, c’était dans le sang. Sentir un danger, c’est plus qu’une odeur, moins qu’une aura, ça ne s’expliquait pas, mais on le savait. Bien sur, si c'était inné, c'était un talent qui se développait, qui se nourrissait d'expérience, sinon ça s'atrophiait comme tout ce qui était humain, et laissé à l'abandon. C'était là la différence avec les machines, qui s'usaient à force de fonctionner, elles. Donc, Daigo avait un sens du combat développé, exacerbé par des années de combat même s'il n'avait finalement que vingt-cinq ans, après ce qu'il avait vécu c'était déjà beaucoup, c'était un peu comme cinquante d'une vie sans avoir à se battre. Cinquante ans de vie paisible, assis dans un rocking-chair au coin du feu, les pieds dans des pantoufles, à lire un roman d'Agatha Chistie. A l'opposé de Daigo, qui du coin de l’œil vit arriver un élève suspect. Non, bien plus que suspect, carrément coupable par anticipation, et une anticipation très proche dans le temps. Cet élève n’avait pas un air normal, comme ses camarades pacifistes mais plutôt l’attitude d’un loup, un loup solitaire. En voyant sa démarche vive, ses épaules tassées sur lui-même pour anticiper l’impact à venir, et la trajectoire de ses pas rapides, Daigo comprit que le gus s’avançait droit sur lui et pas pour lui demander son chemin. D’un geste discret de la main, un code emprunté au base-ball, il intima à sa garde prétorienne de rester en arrière, celui-ci, il allait accepter son défi silencieux …

Comme prévu, l’autre le heurta de façon calculée pour faire chuter le sabre de Daigo, qui fit comme s’il l’avait en effet perdu des mains, sauf que lorsque l’autre se retourna pour le provoquer, il se retrouva avec le sabre entre les jambes, le faisant chuter au sol sous l’effet de surprise. Et Daigo se campa solidement en face du gus, faisant craquer les phalanges d’une main, puis de l’autre.

"Tu veux danser ?"

Lui demanda-t-il avec un calme étonnant, le calme avant la tempête, mais qui contrastait furieusement avec son regard hostile, et ce n'était qu'un prélude. Ce n’était évidemment pas une invitation à danser le tango, mais à se battre. Légalement, Daigo pouvait à présent se défendre contre un agresseur, et il avait des témoins. Ce serait encore plus amusant que si ça c’était passé dans un endroit désert, comme sur un terrain vague par exemple. Le chef du gang aurait pu se moquer du gus, le traiter de petite frappe, mais il sentait que ce n’était pas le cas, ce gus n’était pas inconscient, il savait sûrement se battre et avait du en baver assez pour être un bon adversaire. La vie l’avait lui aussi marqué le visage, ça leur ferait au moins un point commun, jusqu'à ce que Daigo le malmène un peu avant de faire un rapport accablant sur lui, à moins que l'autre s'avère un candidat potentiel pour le gang. Le gus pouvait bien sur refuser l'affrontement, ou même refuser d'intégrer son gang s'il faisait l'affaire. La première impression de Daigo serait-elle la bonne ? Parce qu'un loup solitaire, dans un gang ... mais ils n'en étaient pas encore là. Peut-être que ça ne dépasserait pas la violence psychologique, la tentaticve d'intimidation, en tout cas concernant le gus, parce que Daigo avait une facilité exceptionnelle à mettre les poings sur les i.