Young and Lost [PV Kioku]

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Les couloirs de l’école étaient vides. Pas une personne ne s’y trouvait. Il faut dire que l’heure pouvait expliquer beaucoup de chose. Une heure du matin… Les élèves dormaient tranquillement, les professeurs ne devaient plus travailler et seuls quelques surveillants erraient encore pour vérifier que tout était en ordre. Yuki savait qu’elle devrait être emporté par le sommeil mais elle n’y parvenait pas. Depuis qu’elle était ici elle ne dormait qu’une nuit sur deux. En effet, elle ne parvenait à s’endormir qu’une fois extrêmement fatiguée. Ayant dormi longtemps la nuit dernière cette fois elle se retrouvait à tourner dans son lit encore et encore. Elle essayait comme elle pouvait de fermer les yeux et de se laisser emporter mais rien à faire… Le royaume des songes ne voulait pas d’elle ce soir… L’adolescente finit donc par se redresser. Elle en avait marre d’attendre en vain. Aussi elle se leva de son lit et se rhabilla rapidement, enfilant un jean, un T-shirt et une veste noire trop grande pour elle. Suite à cela elle attrapa son casque qu’elle mit sur ses oreilles et son mp3. Elle mit rapidement ses chaussures et sortit discrètement de la chambre. On lui avait bien précisé que les escapades nocturnes étaient interdites mais tan pis, elle se débrouillerait pour ne pas se faire attraper et puis voilà. La gamine marcha donc discrètement dans les couloirs, de la musique douce dans les oreilles très basse, c’était juste pour ne pas être totalement dans le silence…. Elle n’aimait pas le silence la nuit mais savait qu’elle devait être en mesure d’entendre ce qu’il se passait autour d’elle aussi le son était si bas que peu de personnes arrivaient à écouter de la musique ainsi. Après quelques minutes à déambuler dans les couloirs elle arriva vers les salles de classe. Yuki ne connaissait pas encore très bien les locaux aussi elle avait décidé de se laisser porter au hasard. Arrivée là elle s’adossa contre un mur, prenant une petite pause, les mains derrière son dos, fixant le sol. Elle se sentait bizarre. En temps normal elle ne connaissait pas l’insomnie. Même si elle dormait parfois moins facilement ça allait. En temps normal le noir ne l’effrayait pas tant que ça. En temps normal, sa solitude lui semblait habituelle… Tout se bousculait dans l’esprit de la jeune fille et elle aurait pu rester encore un long moment adossé contre le mur, sans rien faire. Seulement des bruits de pas se firent entendre et la tirèrent de sa rêverie…

Yuki ne réfléchit pas longtemps, quelqu’un allait la surprendre si elle ne réagissait pas vite. Aussi l’adolescente chercha du regard un endroit où se cacher. Elle commença à tourner les poignées mais toutes les portes semblaient verrouiller et les bruits de pas se faisaient plus rapides et plus proches. Une certaine peur l’envahit, se mêlant à sa frayeur du noir aussi elle alla de plus en plus vite. Finalement, une porte s’ouvrit et elle la referma juste derrière elle. La pièce était vide, c’était la salle de Physique. Le matériel était rangé dans des cartons, la lune apportait de la lumière à la pièce blanche, en passant à travers les carreaux. La gamine trouvait l’endroit stressant mais du bruit venait toujours du couloir aussi elle jugea bon de rester cacher encore un peu. Elle se dirigea alors vers un coin sombre de la classe et s’y installa, ramenant ses genoux contre son torse, les tenant avec ses bras. Son esprit vagabondait un peu partout tandis qu’une chanson s’enclenchait. C’était une chanteuse française qu’elle avait découverte sur Internet… Peu connue au Japon, elle l’aimait bien… Elle avait appris par cœur les traductions des paroles et essayait de fredonner parfois dans cette langue si étrange et pourtant si douce. Elle oublia alors pendant quelques instants qu’elle se trouvait dans une situation un peu périlleuse, qu’elle pouvait s’attirer de gros ennuis… Elle ferma juste les yeux et se laissa bercer par la musique…

~Vue d'ici la terre est mienne, mais je prends l'eau
C'est ainsi que vont et viennent les vieux bateaux

Je voudrais revoir la terre
Il y a longtemps que je suis partie
Je voudrais être en hiver
Et très loin d'ici~

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[Désolée de poster ici, je me suis trompée et j'ai posté avec Machi, et là j'trouve plus le bouton supprimer, le temps de réparer cette bêtise, et je te réponds! Encore désolée ]

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[On doit finalement ignorer le post de Machi x) Le bouton est en cours de construction, et on ne sait pas combien de temps va falloir attendre]

Les lumières étaient ternes, il ne pouvait entendre aucun bruit, à part les battements de son cœur. Toujours le même sentiment un peu enfantin de solitude, lui qui paraissait de nature si froide et indifférente. Ce petit coin où il venait très souvent boire lui était laid, il y revenait pourtant à chaque fois, comme attiré par une sorte de quelque chose qu’il ne pouvait pas savoir. Il était simplement comme ça. L’alcool ne lui montait jamais à la tête, quelle que soit la quantité qu’il buvait, il n’était jamais ivre. Certains considéreraient cela plus pour une chance, mais pas lui. Toujours lucide. A penser. A réfléchir. A force, ça déprime, ça détruit, peut-être un peu.

Il délaissa son verre à moitié plein et sortit du bar. Il faisait très noir, et très froid. Il regarda sa montre, déjà minuit. Il n’avait aucune envie de rentrer à son appartement. Maintenant qu’il y repensait, le linoléum était usé, il fallait penser à le réparer. De toute manière cela pouvait attendre, il haïssait cet endroit. C’est incroyable le nombre de choses qu’il haïssait, en fait. C’en était déroutant. Et ça ne le dégoûtait pas de la vie, bizarrement, rien ne le dégoûtait de la vie. Tant mieux. Encore une chance.

Dans ce genre de moments, où il fait noir, où vous avez désespérément essayé de vous bourrer, où des pensées variées et inutiles vous hantent la tête, vous avez envie de faire ce que vous aimez le plus. Juste parfois, par coup de tête. Et ce dont il avait envie, en ce moment précis, c’était son matériel de physique. Cette matière-là, il ne s’en lassait pas. Il avait envie de toucher son matériel, de le dépoussiérer, le regarder, le tournant entre ses doigts avec la même fascination qui l’avait animé lorsqu’il était encore un étudiant. C’était assez inhabituel, que la matière que vous enseignez n’entre pas dans votre routine, si bien qu’elle vous fascine encore.

Il avait les clés de la salle, même s’il ne verrouillait que son armoire à outils, celle où il range son matériel. Il n’aimait pas particulièrement rôder au milieu de la nuit dans un lycée désert, mais s’il rentrait maintenant, il ne dormirait sûrement pas. Il soupira. A quoi bon ? Ses caprices prenaient toujours le dessus.

Evidemment, le lycée était tout aussi désert et sombre que la rue dans laquelle son bar se trouvait. Il n’y avait personne. Du moins, c’est ce qu’il croyait. Il se dirigea machinalement vers sa salle, tendit brusquement la main vers la porte et remarqua qu’elle était légèrement entrebâillée. Il crispa ses doigts sur l’entrebâillement et l’ouvrit lentement. Personne, apparemment. Il fit quelques pas en avant et se pencha légèrement. Là, il vit une silhouette recroquevillée dans un des coins de la salle. Il ne pouvait pas la définir, et apparemment, elle ne l’avait pas entendu entrer, pour une raison qui lui échappait encore. Il s’approcha prudemment pour ne pas la brusquer et remarqua que c’était une jeune fille aux cheveux courts, avec des écouteurs dans les oreilles.

Se disant qu’il était inutile de l’aborder, il tendit sa main vers elle et lui serra très doucement l’épaule, le sourire aux lèvres, pour ne pas l’effrayer.

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Ainsi envahie et bercée par la musique Yuki en avait oublié d’être prudente. Elle n’y pouvait rien, elle possédait en elle une forte sensibilité à la musique, à l’art en général, qui la faisait littéralement sortir du monde réel quand elle tombait sur un œuvre qui lui parlait… Ca avait été le cas à cet instant et par conséquent elle n’avait pas entendu que quelqu’un venait d’entrer dans la pièce. Elle aurait d’ailleurs pu continuer à l’ignorer encore longtemps, rien ne la prévenait de cette intrusion. Pourtant l’adulte vint poser sa main sur son épaule, doucement certes, mais elle sursauta quand même et releva la tête. Son regard se posa alors sur l’inconnu et elle fut surprise de voir un sourire sur ses lèvres. Elle se serait plutôt attendue à une mine sévère, à voir le visage d’une personne qui s’apprêtait à lui faire passer un sale quart d’heure… Mais non, rien de tout ça. Juste un visage décoré par un sourire. La gamine pencha alors doucement la tête sur le côté, comme pour mieux observer celui qui se trouvait désormais en face d’elle. Il avait quelque chose à la fois d’hostile et d’attirant. Elle ne savait pas comment expliquer cette sensation… Il semblait gentil et pourtant, comme s’il cachait quelque chose… L’enfant retira alors son casque de ses oreilles, le laissant autour de son cou. Elle hésitait… Elle savait très bien que prendre la parole et s’expliquer, s’excuser était la chose à faire pourtant elle n’arrivait pas à s’en convaincre. L’étudiante resta donc quelques secondes encore silencieuse, comme si une force invisible maintenait ses lèvres closes. Puis, enfin, tout sembla se délier et sa voix résonna dans la salle de physique. Elle parlait doucement, une habitude dès qu’il faisait noir, et avait le même ton enfantin qu’à l’habituel.

« Excusez moi… Je sais que je ne devrais pas être ici…. Je… je ne trouvais pas le sommeil… »

Yuki détourna alors le regard, comme à chaque fois qu’elle se sentait profondément idiote. Son excuse était nulle, même si c’était la vérité, tout le monde disait toujours ça. Il n’allait sans doute pas la croire et la punir. Malgré ce sourire il devait respecter le règlement. Du moins c’était ce que la jeune fille pensait bien qu’elle espérait tout autre chose. De nouveau gênée elle se remit sur ses pieds, ramenant instinctivement ses bras contre son torse, comme si elle voulait se protéger alors que concrètement, rien ici ne représentait le moindre danger. Au contraire, le noir qu’elle trouvait effrayant ne l’était plus vraiment maintenant qu’il y avait quelqu’un d’autre avec elle. Pourtant elle conservait cette crainte de l’inconnu, comme si tout ce qu’elle n’avait pas étudié à l’avance pouvait être une menace… C’était un peu stupide dans le cas présent. N’importe qui ne pouvait pas entrer dans le pensionnat aussi elle ne craignait rien, ce ne pouvait être qu’un surveillant ou un professeur et même s’il la disputait, ce n’était pas bien grave. L’adolescent garda cependant une certaine distance entre elle et l’homme. Elle secoua alors légèrement la tête pour replacer ses mèches correctement, n’aimant pas que son visage soit totalement dégagé, une sorte de pudeur. Puis, n’oubliant pas pour autant les marques de respect, elle s’inclina à la japonaise et reprit la parole.

« Je me nomme Yuki Kuro… Je suis collégienne en 2.A… Je m’excuse encore de m’être introduite ici en pleine nuit et j’accepte la punition que je mérite… »

Yuki resta inclinée, attendant une quelconque autorisation pour relever la tête. Elle avait brutalement quitté son monde de musique et de rêves pour plonger dans la réalité, pleine de cette hiérarchie qui selon elle ne faisait qu’éloigner les hommes mais qu’elle s’obligeait à respecter. Elle priait au fond d’elle pour que l’adulte soit gentil et compréhensif tout en se préparant à se faire disputer. Pourtant…. Pourtant ce sourire ne cessait de la hanter… Il ne pouvait pas être méchant…

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Et le petit visage qui lui semblait enfantin, maintenant qu’il se considérait pleinement comme un adulte, se pencha pour mieux le regarder. Ses yeux surpris, puis interrogateurs, ensuite un peu apaisés, où luisait cependant une certaine réticence. Il aimait les regards expressifs, où il y’a de la chaleur. C’est vivant et c’est humain, et il aimait ça.

Et alors les petites lèvres s’excusèrent, et alors son regard se détourna. Et c’était mignon comment elle balbutiait, comment elle s’était levée pour adopter une position de défense, comme si elle voulait se protéger. Les enfants, c’est tellement fragile après tout.

Elle secoua alors sa tête et se présenta. Yuki Kuro. Elle ne faisait pas partie de ses élèves.

La lune se leva, belle, audacieuse, les inondant de sa lumière argentée. Et il put clairement voir son visage. Il l’avait déjà croisée dans les couloirs, dans la cours, même si elle n’était pas son élève, il se souvenait parfaitement de son visage. L’expression qu’elle arborait était craintive, en même temps inoffensive, un peu réticente. Elle devait penser qu’il la gronderait et qu’il l’enverrait vite fait au dortoir. Or il n’avait pas la tête à gronder et puis… l’excuse de cette jeune fille semblait si simple, si évidente qu’elle pouvait être vraie, auquel cas il ne lui en voudrait pas de ne pas trouver le sommeil.

Il s’éloigna d’elle, sortit ses clefs et ouvrit son armoire à matériel.

-Je ne suis qu’un simple professeur ici, mon travail est de vous enseigner la Physique, ni plus ni moins. Je laisse les soins de la discipline aux surveillants, c’est leur travail à eux. Il faudra juste prendre garde à ne pas vous faire surprendre par l’un d’entre eux.

Il dit ça lentement, d’un ton doux. Il pouvait se tromper. Il se trompait parfois sur ce genre de jugements, ce n’était pas du tout son fort, mais il n’avait aucune envie d’infliger à cette élève une quelconque punition.

Il saisit entre ses mains un récipient, une éprouvette et des tubes à essai et se retourna vers elle, un sourire amusé aux lèvres.

-Et puis, si je rapporte que je vous ai trouvée en plein milieu de la nuit dans ma salle, ça reviendrait à dire que moi, je m’y étais rendu à cette salle, à une heure aussi tardive. Je suis autant coupable que vous.

Il déposa ce qu’il avait dans les mains sur son bureau, sortit des serviettes propres et entama de nettoyer un tube à essai, dans le plus grand calme et silence.

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Yuki fut très surprise par ce professeur. Non seulement il ne la disputait pas mais en plus il lui rappelait de bien faire attention à ne pas se faire attraper par un surveillant. La jeune fille resta incrédule quelques secondes. Ce n’était pas à un tel comportement qu’elle s’était attendue. Même s’il semblait gentil elle aurait tout de même imaginé une petite remontrance, un reproche et non pas tant de calme. Seulement l’adolescente n’était pas au bout de ses surprises. Alors qu’elle regardait l’adulte sortir du matériel de physique des placards, ce dernier reprit la parole, lui adressa même un sourire. Ce qu’il dit était amusant et la gamine laissa échapper un léger rire, enfantin, cristallin. Cet homme était vraiment surprenant. Il se comportait avec lui de manière presque complice alors qu’elle venait à peine de le croiser. N’étant pas habituée à ce genre de choses elle se trouvait toute contente. Elle le regarda alors commencer son nettoyage et eut envie de s’approcher. Elle ne savait pas vraiment si elle en avait le droit. Peut-être devait-elle partir dès maintenant et ne pas le déranger plus longtemps. Retourner dans sa chambre et chercher de nouveau désespérément le sommeil. Cette perspective ne l’enchantait absolument pas et elle avait plutôt envie d’abuser de la gentillesse de ce professeur, en quelque sorte. Elle voulait discuter un peu avec lui, pour rompre cette solitude et avoir quelque chose de doux auquel penser avant de dormir. Aussi, timidement elle s’approcha du bureau et s’appuya dessus. Profitant de sa petite taille elle posa ses bras directement dessus et sa tête sur ces derniers. Se baissant un peu tout de même. Elle observa alors le matériel de chimie, se demandant pourquoi il sortait une telle chose en pleine nuit mais après tout chacun avait ses mystères. Doucement, elle prit alors la parole de sa voix d’enfant. Pourtant, bien qu’elle semblait ailleurs quand elle parlait, une certaine maturité ce dégageait de tout ça. C’était ce qui faisait en soit la complexité de sa personnalité.

« Je trouve ça intéressant les sciences. Même si c’est pas dans mes cours j’aime bien m’y intéresser, surtout les expériences mais… En même temps, je n’aime pas l’idée de chercher une réponse à tout… L’être humain ne peut être expliqué par la science, déjà qu’on a du mal à le comprendre avec son cœur… »

Yuki fixait l’un des tubes à essais mais on regard était perdu dans le vide. Ces yeux étaient légèrement éclaircis par rapport à d’habitude, peut être grâce à l’éclat de la lune. La gamine resta quelques secondes ainsi sans bouger puis au bout d’un moment elle cligna des yeux et sembla, comme retourner à la réalité. Elle repensa alors à ce qu’elle venait de dire et ses joues s’empourprèrent légèrement. Elle eut alors envie de revenir en arrière, se disant qu’elle n’aurait peut être pas du sortir ça à un professeur de physique. En même temps c’était ce qu’elle pensait réellement. Elle trouvait la physique intéressante, tout comme la chimie mais cette envie de comprendre tout et n’importe quoi que ce soit à l’échelle du monde ou des atomes l’exaspérait parfois. Disons qu’elle trouvait cela désuet face à la complexité du genre humain. Bien sûr personne ne voulait l’écouter quand elle disait ça. Tout le monde pensait qu’elle était bien trop jeune pour avoir des réflexions assez sérieuses sur le sujet et se composer un vrai opinion. Ce n’était qu’une enfant bornée. La petite brune approcha alors ses doigts d’un des objets en verre mais elle ne le toucha pas par respect. Cela ne se faisait pas, surtout vu le soin avec lequel le professeur les nettoyer. Aussi elle se contenta de les redessiner du bout des doigts, comme si elle pouvait effleurer la matière transparente. De sa petite voix enfantine elle reprit la parole après avoir ramené sa main sous son menton et relevé légèrement le regard vers son professeur pour le regarder tout en parlant.

« Vous n’arrivez pas à dormir vous aussi ? »

Yuki savait que cette question pouvait paraître trop personnelle mais sa candeur avait reprit le dessus et elle avait posé cette question en toute innocence, comme elle aurait demandé s’il aimait la pluie, les nuages et le vent.

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La lune se reflétait sur le verre désormais immaculé de l’outil entre ses doigts. Le bleu de son regard y était plongé, perdu. C’était une lumière douce, argentée, pourtant si âcre, si douloureuse. Il regarda de nouveau la lune et repensa à une légende qu’on lui avait comptée une fois auparavant. Celle de la Lune et de son Amant qui aurait traversé leur monde et descendu sur terre pour lui apporter une rose. Il n’arrivait pas à se souvenir des détails, ni de la fin de cette légende. Il baissa un peu la tête et ouvrit plus grand les yeux. Encore perdu dans ses pensées. Irrécupérable. La jeune fille parla alors, l’arrachant entièrement à ses réflexions floues et confuses. Il ne l’avait pas vue s’approcher, sans doute l’avait-elle fait de manière discrète et timide. Il en fut assez surpris.

Il sourit tendrement. Elle était vraiment si enfant. Lui aussi, à son âge, pensait à peu près pareil. A quoi bon ? L’être Humain ? La physique ne se focalise aucunement sur l’être humain. Mais plutôt sur tout ce qui est matériel… palpable. Faite pour permettre à l’homme de comprendre l’objet qu’il saisit entre ses mains, qu’il voit et qu’il traite. D’avoir une idée, aussi minime soit-elle, de l’environnement qui l’entoure. Après tout, n’est ce pas ce qui le différencie des autres êtres vivants ?. . . Pourtant, c’était assez contradictoire. Après tout, elle traite de même des sujets beaucoup plus complexes. Des hypothèses, quelque chose qui n’est pas là, mais qui peut exister. C’était assez difficile d’y songer de la sorte. Et surtout d’en parler. Il opta alors pour l’argument le plus facile à comprendre, sans doute le plus stupide mais le plus vrai.

-Evidemment, quand vous dites ça comme ça, cela parait logique. Mais dites-moi, pourquoi buvez-vu de l’eau ? Pourquoi dormez-vous ?

Il déposa le tube sur le bureau et se passa la main dans les cheveux en détournant les yeux vers la fenêtre, une fois de plus.

-Parce que vous en avez besoin. Parce que ça vous est vital. C’est exactement la réponse à votre question indirecte. C’est vrai… notre « humanité » ne nous permet sans doute pas de saisir l’univers et ses secrets, mais nous avons tout simplement besoin de chercher, de savoir, et c’est cette envie, avant toute autre, qui nous pousse à entreprendre ce genre d’expériences, à émettre des hypothèses et à les confirmer si c’est possible.

Il rit alors, amusé, son regard toujours perdu dans la lune. Pourquoi l’être humain se sentait-il obligé de mettre son pied sur cette lune si pure, si belle ? Comme pour la souiller… Il se sentait tout simplement en besoin de souiller toute beauté voilée, de mettre à jour tout mystère, de faire la lumière sur tout ce qui parait inaccessible, de violer toute beauté qui réside en ces secrets. Et c’est ce qui faisait qu’il aime et qu’il haïsse cette matière, si profondément, paradoxalement.

Il se retourna brusquement vers elle, confus.

-Ce que je dis parait peut-être stupide ou trop facile, mais c’est une vérité qui m’est très claire.

Il se tut un instant, comme de nouveau perdu dans ses pensées et reprit:

-Je ne dors presque jamais la nuit.

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Yuki écouta attentivement le professeur quand il partit dans un discours presque enflammé sur les sciences et leur intérêt. Elle pouvait être d’accord avec lui mais pas entièrement. Elle lui sourit tout de même, secouant la tête de manière négative quand il ajouta que ce qu’il avait dit pouvait paraître stupide ou trop simple. Elle ne le voyait pas comme ça. En effet, elle avait très bien senti, durant sa prise de parole, qu’il exprimait sa passion, qu’il exprimait un de ses buts, une de ses envies aussi elle ne pouvait pas se permettre de juger ça stupide ou désuet. Cela venait du cœur et indéniablement cela avait donc un sens. La gamine avait cependant envie d’ajouter quelque chose mais elle laissa l’idée mûrir dans son esprit plutôt que de prendre la parole trop vite et de sortir quelque chose de confus. Elle fut cependant surprise quand l’adulte lui déclara qu’il ne dormait presque jamais la nuit. Beaucoup d’interrogations se bousculèrent alors dans sa tête. Elle regarda doucement l’homme et se demanda ce qui pouvait empêcher une grande personne de dormir. Elle savait qu’ils avaient leurs problèmes etc mais eux qui se moquaient souvent des enfants effrayés par le noir, comment pouvaient-ils ne pas trouver le sommeil ? Son raisonnement sur la question était extrêmement naïf et elle le savait très bien pourtant elle n’arrivait pas à s’ôter cette façon de penser de la tête. Finalement, elle se décida à parler de nouveau, calmement.

« Si je bois c’est parce que j’aime quand l’eau coule dans ma gorge. Et je dors pour reposer mon esprit de ce qui le fatigue. Pour oublier ce que je n’aime pas lorsque je suis éveillée… Je sais qu’on a des besoins mais… Je préfère voir le monde de manière moins calculée et matérielle. Je préfère me dire que quelqu’un bois un verre d’eau parce qu’il l’apprécie plutôt que pour éviter de mourir de soif. Je préfère me dire que cet enfant prend son bain pour jouer et parce qu’il aime l’odeur du savon plutôt que parce que la société lui a expliqué qu’il est obligé de se laver, à cause de l’hygiène… Je sais que ça peut paraître naïf… Vous me direz que je ne suis qu’une petite fille et que c’est pour ça que je résonne comme ça mais… J’ose croire qu’en grandissant je ne changerai pas... »

Yuki se rappela alors qu’elle n’avait pas éteint son mp3. Elle sortit donc l’appareil de sa poche mais à cause d’une fausse manipulation elle augmenta le son, et Knockin’ on Heaven’s Door de Bob Dylan se fit entendre à travers son casque. La jeune fille resta immobile. Incapable d’éteindre la chanson. Elle ferma doucement les yeux et sans vraiment s’en rendre compte elle commença à chanter par-dessus la mélodie. Sa voix était douce et parfois bien plus mature que ce que l’on pourrait penser en la voyant pour la première fois. Elle ne possédait absolument pas une voix fluette comme les petites filles. La gamine se rappela pourtant, au bout d’un moment, qu’elle n’était pas seule. Rougissant soudainement elle éteignit pour de vrai cette fois le petit appareil et baissa la tête, n’osant pas regarder l’adulte après ça. Elle essaya cependant de rester calme et décida de se concentrer sur autre chose, histoire de faire passer sa gêne. Elle repensa alors à la révélation du professeur sur le fait qu’il ne dormait presque jamais. Elle alla alors près de la fenêtre et montra la lune du doigt. Un sourire enfantin se peignit alors sur son visage.

« Je comprends… Mais vous savez dans ces cas là, regardez la lune et dites vous qu’elle veille sur vous et vous protège de tout ! »

Yuki avait dit ça sur un ton enthousiaste et elle se mit à rire doucement à la fin de ses paroles. Son sourire resta imprégné sur son visage. Elle avait réussit à se concentrer sur quelque chose de joyeux et maintenant il était hors de question qu’elle sorte ça de son esprit, du moins aussi longtemps qu’elle le pourrait. La gamine souffla alors doucement sur le carreau, grâce à la différence de température de la buée se forma sur la vitre. Amusée elle décida d’écrire quelque chose. Elle souffla plusieurs fois pour augmenter l’espace où elle pourrait tracer les lettres. Bientôt, on pu lire sur la vitre « La lune est notre ange gardien ». La petite brune sourit de nouveau à l’adulte et retourna se mettre en face du bureau, s’amusant à regarder à travers le verre du matériel de chimie.

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[Désolée si c'est court, ces derniers temps j'ai une affreuse panne d'inspiration ^^']

Si je mange c’est parce que c’est bon, si je dors c’est pour rêver, pourquoi devrais-je toujours justifier ma routine par des fatalités telles que les besoins ? C’est dérisoire. Evidemment, toute chose existante ne l’est que parce qu’elle est utile, du moins c’est ce qu’on avait essayé de lui apprendre, et c’est là la face principale de toute chose. Pourtant, c’est tellement plus beau lorsque je regarde de l’autre côté. D’accomplir parce que j’en ai envie, parce que ce besoin brut et vital ne passe pas au-dessus des désirs, parce que les désirs eux-mêmes sont des besoins…

Tout cela il y avait pensé. Il avait eu le temps et la tête pour y penser… Quand on prend en compte la douce adolescence qu’il avait vécue. Et à présent, en écoutant cette jeune fille lui répéter les mêmes pensées qu’il avait eues des années plus tôt, il sourit. Un sourire flou, jaloux, quelque peu sec. C’était si bien de croire ce genre de choses. Il aurait bien voulu continuer de le faire, lui. Choisissant ce chemin qu’est la facilité. Et même si c’était faux il aurait continué à y croire. Pace que c’est doux d’être naïf, de voir tout d’un œil flou, de penser au-delà du matériel, du concret. Pourtant on grandissait. Notre cerveau mûri, cependant il ne saurait dire si c’est bien ou mal. Ce doit être pour le mieux après tout, si ce n’était pas le cas tout le monde vivrait dans le rêve. Il y aurait au moins ces « adultes » mûrs et responsables qui vivront toujours dans la réalité. Comme lui. Et même s’il n’en avait pas vraiment envie c’était ainsi.

Et contrairement à elle il ne s’était pas demandé s’il changerait en grandissant. Il n’avait pas formulé le désir de ne pas mûrir. A présent cette idée lui paraissait candide et irréalisable, peut-être que des années auparavant il l’aurait trouvée possible et pas bête.

Et il regarda la lune, lorsque la jeune fille la mentionna. Il se souvint alors de la fin de cette légende. L’amant de la Lune n’avait pas pu rentrer, une fois descendu dans notre monde il ne pouvait plus rentrer, alors il la regardait, chaque nuit, en lui racontant toutes sortes d’histoires. Il n’avait jamais cessé de l’aimer. L’histoire l’avait un peu marqué dans son enfance, sans doute parce que sa fin est aussi heureuse que triste. Il baissa les yeux, un sourire s’arqua sur ses lèvres.

-Ca doit être bien de croire tout cela. Par contre je ne saurai pas vous dire si le fait de vouloir rester enfant est la meilleure chose à faire.

Son sourire s’élargit, devenant ironique, et il ajouta.

-Après tout, je ne suis qu’un adulte, je ne peux pas comprendre.

Puis, désignant la lune du menton, presque autant ironique.

-Par contre je savais déjà qu'elle veille sur moi. C'est en partie pour cela que je n'arrive pas à dormir.

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[Désolée pour tout ce retard...]

Yuki perçu toute l’ironie dans les paroles du professeur et elle en fut vexée. La jeune fille recula alors du bureau et alla s’asseoir sur une table, fixant ses pieds qui se balançaient doucement dans les airs. Elle savait très bien que vouloir rester enfant n’était pas forcément une bonne chose. Que de toute façon cela ne réglait pas tous les problèmes et que dans un monde tel que celui-ci c’était même presque impossible. L’Homme se débrouille toujours pour vous ramener à la réalité, il refuse de vous laisser rêver trop longtemps. Pour lui ce n’est qu’une hérésie que de croire en la naïveté comme quelque chose de bon et de doux. Mais elle voulait croire encore en certaines illusions. Sa façon de lui dire ça, mais surtout de lui répondre que de toute façon il n’était qu’un adulte et qu’il ne pouvait pas comprendre l’agaçait au plus haut point. Pourquoi fallait-il qu’il réagisse ainsi ? Il semblait gentil pourtant alors pourquoi partait-il soudainement dans un tel extrême ? Elle ne comprenait pas… Elle préféra donc ne rien ajouter, ne voulant pas se prendre une nouvelle remarque dans la figure qui risquait juste de la blesser. Cependant il reprit la parole et lui expliqua que c’était sans doute parce qu’il savait que la lune veillait sur lui qu’il ne parvenait pas à dormir. Sa curiosité fut alors piquée à vif et elle reporta immédiatement son regard sur lui. Inconsciemment elle se mit à le fixer, comme si elle cherchait une réponse sur les traits de son visage ou dans le plus profond de son regard. Ne pouvant résister, elle se leva et s’approcha de lui. Elle contourna le bureau pour aller se planter juste à côté de lui. Elle tira alors sur sa manche, le forçant à se baisser pour pouvoir ainsi approcher ses lèvres de son oreille. Elle reprit la parole dans un simple murmure.

« Tout d’abord vous n’êtes pas qu’un simple adulte si vous êtes sensible à la lune… Ça veut dire que vous avez gardé votre âme d’enfant quelque part… Et si jamais elle vous a fait du mal, vous pouvez me le dire à l’oreille, elle ne le saura pas… »

Yuki lui adressa alors un sourire rassurant. Elle jeta un coup d’œil discret vers la lune, la fusillant même du regard. Elle l’aimait bien cette madame lune mais si maintenant elle empêchait certaines personnes de dormir alors plus rien n’allait. Ce monde devenait réellement totalement fou. A ce rythme là ce serait la fin de tout bien plus tôt que prévu. Elle détestait le genre humain, cette perfidie, cette méchanceté et pourtant, une part d’elle, ce côté enfantin se refusait à ce qu’on détruise ces êtres malgré tout pourvu d’un cœur et d’une âme. C’était en partie pour cela d’ailleurs qu’elle se trouvait dans un trouble si important. Elle ne savait plus elle-même ce qu’elle voulait, ce en quoi elle croyait. La jeune fille recula alors un peu et baissa la tête, craignant comme des représailles de la part du professeur. Elle venait de se rendre compte qu’elle s’était peut être montrée un peu trop familière avec lui et craignait une réaction. Elle ne cessait de changer de comportement depuis le début, ce qui pouvait paraître surprenant, voir déstabilisant mais elle-même ne savait plus vraiment sur quel pied danser. Elle pensa alors regagner son dortoir mais elle n’avait vraiment pas envie de dormir et traverser tous ces couloirs de nouveau, seule, alors qu’elle ne serait plus autant perdue dans ses pensées risquait de la paniquer totalement. La petite brune entreprit alors de s’excuser de nouveau.

« Désolée… D’être aussi familière… et naïve… Mais… Il m’arrive de vouloir… Croire que le monde n’est pas ce qu’il est… Les Hommes… Différents de ce qu’ils sont réellement… »

Yuki regarda alors ailleurs et ses yeux se perdirent dans le vide. De nouveau son esprit se mit à errer sur des plaines de réflexions des plus surprenantes, comme si d’un coup elle oubliait tout le reste, tout ce qui pouvait se passer autour d’elle et qu’il n’y avait que cela qui importait. Pourtant elle était elle-même incapable d’expliquer clairement ce à quoi elle pensait. C’était flou et pourtant, elle savait que cela avait un rapport avec la condition humaine qu’elle cherchait depuis si longtemps à comprendre.

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