Life's unfair... [PV Fuyu]

Ou quand les taches ne partent pas.

Il ne savait pas trop ce qu’il se passait aujourd’hui. Une vague envie de sortir. Une vague envie. Le vent soufflait mollement. Comme pour signaler sa présence. Comme un gosse qui crie juste pour que sa mère le remarque. Appuyer sur le rebord de la fontaine, Soren détaillait la petite place sur laquelle il avait atterri au grès de ses vagabondages. Un chat, pelotonné sur le rebord d’un fenêtre semblait se repaître des rayons du soleil qui tapait fort par cette après midi. Et la foule passait. On se regardait, on parlait fort. Une place passante.

Soren aimait bien observer les gens. Et imaginer. Imaginer leur vie. Juste à partir de quelques détails. Il se trompait souvent, l’apparence n’est pas tout, mais cela l’occupait. Il tira la langue à une petite fille qui lorgnait sur ses chaussettes dépareillées. La petite fille rie et lui était stupidement content. Rendre les gens heureux quelques instants était une satisfaction personnelle très importante pour lui. Trop gentil, peut-être un peu trop naïf aussi. Il s’appuya un peu plus contre la fontaine, regardant d’un air fatigué la canette qu’il avait posé à côté de lui. Il attendait. Il ne savait pas trop quoi mais il attendait. Peut-être une personne se démarquant du lot ? Peut-être quelqu’un. Une nouvelle rencontre. Une nouvelle façon de penser. Quelque chose d’enrichissant. Quelque chose de nouveau ? Il était curieux. Il aimait bien rencontrer des gens différents. C’était toujours très constructifs, du moins le pensait-il.

La fontaine coulait dans son dos, l’arrosant. Un coup de vent. Sa canette qui se casse la figure. Le passant devant lui, éclaboussé. Un truc super sucré. Un truc bien collant. Il releva la tête, pâle et désolé. Il cligna des yeux. Il allait se faire engueulé, il le sentait gros comme une maison. Plus gros qu’une maison. Un immeuble peut-être. Sa bouche se tordit en un rictus craintif.

« Je suis désolé… »

Il se frotta les cheveux. Les ébouriffant plus nécessaire. Dieu que la vie était injuste.

Fuyu avait décidé de partir se promener un peu, après avoir discuté avec un surveillant. Il li avait reproché son comportement et des bidules dans le genre. Il ne l'avait même pas écouté, car l'envie de prendre un peu l'air l'avait prit d'un coup. Il y avait longtemps qu'il n'avait pas franchit la porte du lycée. Un peu ébloui par le soleil resplendissant, il se rendit rapidement dans la rue en voyant la cour vide. Elle était déjà un peu plus pleine. Pour éviter de rentrer directement dans le lycée, il regarda ses pieds. Il fallait qu'il sorte, c'était important. Finalement, il se retrouva rapidement au milieu d'un carrefour pleine de monde. Exactement ce qu'il détestait.

** Merde. **

Mais il ne fallait pas rebrousser chemin. Surtout pas. Un peu de courage ! Fuyu s'avança, et évita de se cogner contre les passant. Pas bien facile, tout ça. Fuyu se sentait de plus en plus mal. Il jeta un regard en arrière. Il y avait tellement de monde qu'il n'apercevais même plus le lycée. Même pas les pancartes. Soudain, quelqu'un se cogna contre lui. il s'excusa tout doucement et se remit à avancer. Non, ce genre d'endroit ne lui déplaisait pas. Il les détestaient. Le jeune bibliothécaire déboucha rapidement sur une petite place, avec une fontaine au milieu. Le vent soufflait dans ses cheveux, et l'aveuglait. Il avança alors plus doucement, faisant attention. Cet endroit commençait sérieusement à lui faire peur. Soudain, il sentit qu'une grande rafale de vent lui arrivait dans les yeux. Il ferma le yeux pour éviter de se faire souffrir inutilement. Mais quand il les rouvrit, il vit qu'un liquide bien collant lui était tombé dessus. Un gamin avait laissé sa canette sur le bord de la fontaine, et le vent l'avait renversée. Le garçon s'excusa, et se frotta les cheveux. Fuyu se sentait bien trop mal pour s'énerver. De toute façon, il ne s'énervait pas pour ce genre de chose. Il ne dit rien au garçon, se contentant de plonger sonregard jaunâtre dans le sien. Finalement, il réussit à articuler quelques mots.

"C'est rien du tout."

[Pardonnn je savais pas quoi dire T_T]

La petite voix du jeune homme l’interpella. Pas de bruit. Il l’aurait à peine entendu, s’il n’y avait pas prêté attention. Pas de cri. Juste un murmure. Il se pencha et ramassa la canette. Geste plus destiné à retenir l’inconnu et à se donner du temps pour réfléchir qu’à autre chose. Il sourie doucement. Il se leva d’un coup et fit, doucement et calmement, comme un peu évaporé :

« Vous êtes sûr que vous allez bien ? Vous êtes pâle…»

Ce n’était pas de l’empathie, juste quelque chose pour lancer la discussion. Le vouvoiement c’était installé de lui-même, curieusement. C’était plutôt curieux, oui, sachant que l’homme semblait avoir relativement le même âge que lui. Soren n’avait jamais été doué pour ce genre d’évaluation, de toutes façons. Son regard se fixa un instant sur un pigeon qui s’envolait avant d’atterrir vers une poubelle, où il jeta sa canette, vide à présent. Il jeta un coup d’œil coupable au bas du pantalon du gars. Culpabilité, lorsque tu nous ronge. Ses joues rougirent brusquement. Il n’avait réellement pas de chance. Il se pinça le sourcil droit d’un geste absorbé.

« J’vous payerai les frais de…teinturier, je crois ? Du type qui détachera comme un pro votre pantalon en tout cas. »

La voix était hésitante et l’air de Soren plutôt gêné. Si le type avait hurlé, avait été furieux, il aurait compris. Mais là… Cela l’intriguait et il savait que, malgré le fait qu’il aurait du laisser tomber, il jouait les curieux. Et que ce n’était pas bien. Et qu’il cherchait à retenir le jeune homme. Et qu’il devait passer pour un débile. Et qu’il était débile, d’ailleurs. Il s’ébouriffa à nouveau les cheveux. Depuis le début de la discussion, il avait éviter de regarder en face son interlocuteur, trop gêné qu’il était. Il cherchait donc, depuis le début, un point où fixer son regard. Ses pompes, dans l’immédiat. Owned, Soren.

Fuyu regarda le garçon. Il sourit tout doucement, et lui lança un petit "Je vais bien.". Rah le mensonge ! C'est bien la première fois que Fuyu mentait aussi mal. Il baissa les yeux, regardant son pontalon sale. Un pantalon foutu, tant pis ! Il en à plein d'autres à la maison. Mais le garçon tenait à se faire pardonner en payant les frais du teinturier. Fuyu sursauta. Payer ? Certainement pas. Il ne paiera rien du tout, oui ! Non seulement c'est idiot, mais si Fuyu se fait griller il aurait l'air malin >.<.

"Mais non, ça ira."

Donc, Fuyu et son pantalon dégueulasse fixèrent le gamin. Il avait un regard fuyant, et était apparemment gêné. Fuyu fut soudain prit d'un vertige. La poisse. Il s'asseya au côté du jeune homme, sur le bord de la fontaine. Il devait avoir l'air débile. C'était à son tour d'éviter de se confronter au regard du jeune homme. Fuyu se sentait vraiment vulnérable, et il n'aimait pas ça du tout. Il devait vraiment ressembler à un idiot, qui fixe le pigeon qui à eu l'idée de s'installer sur le banc. Passionnant, n'est-ce pas ? Fuyu tourna finalement les yeux vers le jeune garçon. Il paraissait plus jeune que lui et il fixait ses pompes. Bon, ils étaient maintenant sur un même pied d'égalité. Fuyu regarda de l'autre côté, le regard un peu inquiet. Presque éteint. Devait-il rentrer ou non ? Faire un malaise ou être peinard parmi ses livres ? Dur de choisir. Faut être courageux dans la vie, mais pas à en mourir... Tout à coup, le bibliothécaire fut tiré de ses pensées par une rafale de vente gigantesque qui arrivait dans le dos des deux garçons.

[Bouhouhouuu gomen nasai >_<]

Il fronça légèrement les sourcils en redressant la tête vers le jeune homme. Il s’était assis à côté de lui. Ou plutôt –et ce serait peut-être plus exact- il s’était laissé tomber à côté de lui. Ce type était…Trop intriguant. Minuscule voix, l’air mal à l’aise… Pourtant… Mais qu’est-ce qu’il faisait encore là, bon sang ? Il tourna la tête vers l’homme et se mordilla la lèvre inférieure, persécuté par l’idée qu’il n’allait peut-être pas aussi bien qu’il ne le lui avait dit. Il fronça un peu plus les sourcils.

« Vous êtes sûr que vous allez bien… ? »

C’était insistant et plutôt lourd mais Soren trouvait cela étrange qu’il s’assoit à côté de lui. Il avait plutôt l’air de vouloir prendre la fuite, quelques instants auparavant. Il s’ébouriffa les cheveux, sortes de tic nerveux. Il avait peur de faire fuir son interlocuteur et en même temps il sentait qu’il suffirait de bien peu pour que le type se barre en courant. (ou pas, parce que le garçon n’avait pas l’air en état de courir, à part ça.) Quoi que les apparences pouvaient être trompeuses, parfois. Il se pinça le sourcil droit, pleinement pensif. Oui, Soren se pinçait un sourcil dès qu’il réfléchissait. Un autre tic, certes ridicule, mais impossible de s’en débarrasser pour son plus grand malheur.

« Je suis désolé je dois vous paraître lourd et insistant. Mais peut-être que si vous ne vous sentez pas bien, je peux vous aider… ? »

Il sortit son portable de sa poche pour montrer au jeune homme la nature exacte de l’aide qu’il pourrait lui apporter. Nan parce que, oyons clair, il aurait été incapable de le porter sur son dos jusqu’à chez lui. Il n’avait pas la carrure et pas franchement la force. (Bien que l’autre ne lui semblât pas particulièrement lourd.) Il jeta un coup d’œil interrogatif à son portable dont l’écran s’illuminait et vit avec plaisir qu’il avait reçu un texto de son frère. Il le lirait plus tard. Il adressa un léger sourire au jeune homme avant de reprendre la contemplation de ses pieds.

Il se demanda brusquement si l’autre pensait réellement qu’il goberait quelque chose comme le « Ca ira merci » maladif qu’il lui avait servi. Mais il ne dit rien. Parce que le regard vitreux et empli de colère le tétanisa sur place. Avait-il fait quelque chose de mal ? Avait-il poussé l’autre dans des retranchements bien trop lointains ? Sa bouche se tordit en un rictus désolé en voyant l’autre pâlir un peu plus. Il devait faire quelque chose. Un éclair traversa ses yeux et, geste vif, il prit la main de l’autre pour l’emmener ailleurs. Il avait repéré un banc dans une rue adjacente. Moins de monde, l’air y était moins étouffant et il y avait moins de bruit. Il serra un peu la main dans la sienne et fit s’asseoir le jeune homme.

« Ecoutez. Vous êtes tout pâles et j’ai l’impression que vous allez tomber dans les vappes à l’instant. Je vais vous chercher quelque chose de sucrée. Ne bougez pas, vous risqueriez de tomber, d’accord ? »

Il partit en courant vers le convini du coin. Une barre chocolaté plus tard, il était de retour devant le banc. Il lança un sourire faussement désolé au garçon avant de lancer, joyeux.

« Votre kidnappeur s’appelle Soren, au faites. »

Il se rassit sur le banc et, remontant ses jambes contre son torse, appuya son menton sur ses genoux, fixant gentiment le jeune homme à qui il avait refilé la barre chocolatée. Il espérait qu’il aimait le chocolat parce qu’il n’avait plus un sous en poche. Il faut dire qu’en garçon extrêmement organisé, il n’avait emporté que quelques yens. Il se pinça encore une fois le sourcil droit et regarda d’un œil noir le passant solitaire qui s’aventurait dans la rue. C’était réellement beaucoup moins passant. Tant mieux, tant pis, il espérait que ça aiderait le garçon à reprendre des couleurs. Il pencha la tête sur le côté, toujours souriant.

Soren contemplait avec un sourire Fuyu manger la barre. Cela semblait lui faire du bien. Pas beaucoup mais un peu, apparemment. Il s’ébouriffa lentement les cheveux et posa sa joue conter son genoux observant silencieusement le kidnappé. Il avait décidé qu’il était un kidnappeur nyah ha. Ca lui avait pris comme ça. Parce qu’il avait envie de sourire de lui-même un petit peu. Il avait envie que le jeune homme aille mieux. Parce qu’imperceptiblement il sentait que Fuyu aurait beaucoup de chose à lui apporter. Beaucoup de truc à lui faire découvrir. Il était toujours avide d’apprendre et de découvrir. Découvrir des gens, découvrir des choses inutiles. Tester. Pas forcément trouver. Le résultat n’importait pas. Il se mordillait le pouce quand le jeune homme se présenta d’une voix qu’il analysa comme quelque peu tremblante. Le sucre lui avait fait du bien mais il avait besoin de rester au calme encore un peu. Soren avait plus ou moins l’habitude de faire des malaises en publique. Il lui suffisait de peu. Une égratignure, une coupure avec une feuille, une piqûre… N’importe quoi qui lui ferait verser un peu de sang pouvait se retrouver responsable d’un évanouissement ou d’une perte de connaissance. Il ne fallait pas s’étonner de sa peur panique du sang, après.

Il se balança d’avant en arrière d’un air pénétré, tentant de toutes ses forces de retenir ses doigts qui voudrait aller pincer son sourcil. Pauvre sourcil. Le vent lui souffla à la figure, lui balançant poussière et sable dans les yeux. Il grogna, furieux et s’essuya les yeux avec la manche de son pull. Il aimait bien le vent mais il détestait le sable. Il allait avoir les yeux rouges. Comme ceux du hamster albinos qu’avait son voisin. Elle était mignonne la bestiole albinos, d’ailleurs. Il sourit pour lui tout seul. Sourire absent, extérieur et intérieur. Un peu mélancolique, aussi, probablement. Il secoua la tête et se tourna vers Fuyu.

« Je suis content d’avoir pu vous aider. »

Il estimait qu’il avait aidé un petit peu le garçon. Dans tous les cas, il était content. Et quand Soren était content, il souriait… Largement. Vraiment. Très expressif, son visage reflétait à la lettre les émotions qui lui passaient dans la tête. Confuse, heureuse… Son visage rayonnait. Comme d’habitude depuis que son frère était en ville, remarque. Quand son frère était là, il n’avait plus peur. Plus peur de devoir aller à l’hôpital, plus peur de rien. Il se sentait…En bonne santé.

« Vous faites du diabète ? »

Pourquoi du diabète ? Aucune idée, c'étai la première chose à lui êter passé par l'esprit. Il prit soudain un air confus et rajouta précipitamment.

« Sans vouloir être indiscret, hein. »

Fuyu tourna la tête vers Soren, les yeux écarquillés. content de l'avoir aidé ? Dans ce cas... il était heureux d'avoir pu être aidé. Il souria tout doucement. Et se remit à regarder un peu partout, sauf la ru, bien sûr. Soren lu ifaisait un grand sourire, et Fuyu se sentait un peu intimidé par ce sourire. Il titilla ses doigts et regarda ses pieds Il se sentait vraiment comme un gamin qu'on avait ramené à sa mère. Euh, non, mauvaise image, mauvaise image ! Il se retira immédiatement cette idéede la tête. Pas question de retourner dans le pays des mauvais rêves et des idées noirs ! Pas maintenant.

Fuyu se sentait de plus en plus stupide. Ce garçon était bien gentil, mais Fuyu n'avait pas été correct tout à l'heure. Il fallait qu'il s'excuse pour le regard qu'il lui avait lancé. Il avait dû se méprendre et croire que ce regard lui était destiné. Il voulu lui présenter des excuses pour son comportement, mais Soren prit la parole avant.

"Vous faites du diabète ?"

Fuyu réfléchit. Non, pas dans ses souvenirs. Non, autrement il serait à l'hôpital depuis longtemps. Mais disons qu'ici, là, maintenant, Fuyu se "re-découvrait", en quelques sortes. Il réfléchissait plus sur lui-même. Bizarre... Foutu surveillant (encore une fois xD) ! Il aurait pas dû lui parler de sa façon d'agir, de son comportement et de tout déballer sur sa personnalité que Fuyu croyait connaître par coeur ! Croyait...

"Sans vouloir être indiscret, hein."

Fuyu le regarda dans les yeux. Mais il esquissa rapidement son regard. Il sourit et essaya de le regarder dans les yeux, au moins pour lui parler. Il lui dirait qu'il avait une parfaite santé et lui présenterait des excuses au passage. Voilà ! Hum... Ouais, c'est quand même plus difficile à dire qu'à faire...

"Heu... Non, ça n'a rien à voir... C'est différent. J'ai une bonne santé. Et euh..."

Il se titilla encore les doigts. Il se sentait faible et gamin. Et ça, ça ne lui plaisait pas du tout. Il jeta un bref coup d'oeil vers la rue vide, mais le redirigea immédiatement vers les yeux bleus du garçon. Il lui fit un petit sourire, et posa ses mains sur ses genoux (ceux de Fuyu, hein xD).

"Je tenais à m'excuser... Tout à l'heure. Le regard que je t... vous avais fait, c'est pas vraiment pour t... vous."

Le vouvoiement, le pire ennemi de Fuyu ! Il détestait ça, mais il le lui devait bien. Fuyu regarda ses chaussures, et prit une mine déjà un peu plus inquiète. Que faire ? Rentrer et le planter là,ou rester ici en cachant sa peur du mieux qu'il pouvait ? Les deux le dégoûtaient. Vraiment... Le peu de courage qu'il avait eu pendant un court instant l'avait déjà quitté. Bizarrement, Fuyu eut une grosse envie de pleurer...

Foutu surveillant...

Le jeune homme le regardait dans les yeux pour la première fois depuis qu’il lui avait fait tombé sa canette dessus. Ca se fête, non ? Faites péter le champagne, ouvrez les vannes et shbim, joli sourire. Son sourire s’élargit encore plus en entendant l’autre démentir. Non il était en bonne santé. Tant mieux. Ce n’était pas donné à tout le monde. Le différent lui mit quand même un poids sur l’estomac. Si ce n’était pas un problème de santé, peut-être était-ce pire, au fond ? Une maladie, même incurable, n’est que physique, au final, alors autre chose, ce n’était peut-être pas enviable, au final. Son joli minois se tordit en une moue dépitée et un peu inquiète que le sourire tout neuf de Fuyu effaça. Les gens qui arrivent à sourire contre tous sont des gens forts. Soren en était intimement convaincu. Et quand Soren croit en quelque chose, il est dur de lui en faire démordre. Son frère pourrait en témoigner ! Il rigola tout seul en repensant à toutes les fois où son frère avait tenté de lui faire changer d’avis. Innombrables. Et à chaque fois infructueuses. Il sourit tout seul et tourna son regard vers Fuyu en l’entendant buter sur le vous. Vous ayant bien failli se transformer en Tu. Ca n’aurait pas du tout déranger Soren. Le jeune homme avait l’air plus vieux que lui. De peu certes. Mais ça ne changeait rien. Il lança un sourire en coin à Fuyu et lança, malicieux :

« Vous pouvez me tutoyer, vous savez. Je ne suis pas encore centenaire. »

La remarque était enfantine et joyeuse. Reflétant trait pour trait celui qu’il était devenu avec le temps. Il s’aimait bien, maintenant. C’était curieux mais ainsi.

« En tout cas j’espère que vous n’avez rien de trop grave. Ce serait embêtant. »

Ce serait embêtant… La phrase pourrait paraître plate et dénué de sentiments. Dans la bouche de Soren, elle apparaissait clairement soucieuse et loin d’être désinvolte. Quoi qu’est l’inconnu –car, oui, tout de même, Fuyu restait un inconnu- cela le touchait. Les problèmes de santé l’affectaient énormément, dans tous les cas. Trop sensible. Son portable vibra une nouvelle fois dans sa poche. Il leva les yeux au ciel et adressant une moue désolée à Fuyu, le sortit de sa poche.

« C’est mon frère. Si je ne lui répond pas ça va être ma fête quand je rentrerai au pensionnat… »

Il tapota quelques mots sans grande conviction, il n’aimait pas trop les téléphones en général. Il en avait plutôt un pour une question pratique. Au cas où, il se couperait et ferait une hémorragie grave dans une rue déserte. Par exemple. C’était stupide…

Beaucoup de choses lui étaient compliqués. Comprendre les autres, par exemple. C’est sans doute à cause de cela que son visage affichait un air clairement dépité. Il n’arrivait pas à trouver le mode de fonctionnement du jeune homme en face de lui et avait l’impression que, quoi qu’il fasse, le résultat serait le même. Surtout qu’il avait clairement senti une panique latente lorsqu’il avait évoqué, au détour d’une phrase des plus banales, le pensionnat. S’ébouriffant les cheveux d’une main et se pinçant le sourcil de l’autre, il regardait dans le vide, s’interrogeant sur la conduite à tenir. Fallait-il le traîner jusque chez un médecin de force ? Ou le laisser, tendu et pâle, assis sur le banc ? Le choix fut, pour tout dire, rapidement fait. Ni l’un, ni l’autre. Frottant machinalement son poignet, il tenta, d’un ton doux dont il ne s’était –du moins il lui semblait- pas départi :

« Dites moi… Il y a quelque chose qui vous effraie à ce point, par ici ? Vous semblez paniqué… »

Renversant la tête sur le dossier de la chaise, il remonta à tâtons sa chaussette droite. Cette saleté de chaussette n’arrêtait pas de descendre, retombant sur son mollet en paquet. C’était moche et pas très pratique pour marcher. Fixant à nouveau Fuyu, il lui lança un léger sourire d’encouragement. Il ne comprenait pas très bien ce qui était susceptible de clocher. Il éteignit son portable en un geste furtif. Il trouvait cela très malpoli de regarder son téléphone lorsque l’on discutait avec quelqu’un. Il resserra d’un geste frileux sa veste. Il faisait plus froid, dans cette rue. Un froid insidieux qui se faufilait avec le vent sous les vêtements, frigorifiant de la tête aux pieds. Se pinçant le sourcil sans douceur, il réfléchissait à la tournure à donner à la situation. Il ne pouvait pas rester ici trois heures, non plus. Ils allaient choper froid. En même temps, l’homme n’avait pas l’air de se remettre, semblant même, par moment, plus mal.

S’ébouriffant les cheveux, laissant s’étirer le silence, il regardait le chat qui les fixait de l’autre côté de la rue. Se penchant en avant, il claqua des doigts, l’appelant à mi-voix, espérant l’attirer. « Eh, le chat… » Il tendit la main, le voyant s’approcher. Il le laissa renifler ses doigts. Il ne voulait pas l’effrayer. Grattant entre ses deux oreilles avec douceur, il l’entendit ronronner. Un léger rire naquit dans sa gorge et il se tourna vers Fuyu, un sourire enfantin sur les lèvres :

« J’adore les chats… »

L’information était foncièrement inutile mais il voulait le préciser. Juste comme ça. Histoire de riser le silence de mort qui pesait entre eux. Le chat se frotta contre sa jambe alors qu’il caressait son dos.